Oct 022009
 

boite de PandoreAu lendemain du vote des militants socialistes sur la question de la rénovation de leur parti, quelques enseignements peuvent être tirer.

Au PS au moins, on vote : Le grand mérite du Parti Socialiste est d’avoir depuis longtemps choisi de tenter l’aventure démocratique. Et avant toute analyse d’un scrutin socialiste, et même de sa sincérité, il est utile de rappeler qu’à droite comme au centre (c’est-à-dire à droite), on ne se risque jamais à organiser le débat démocratique, encore à moins à faire voter les militants – tout au plus leur demande-t-on, à l’occasion, de plébisciter le chef. A droite, et particulièrement à l’UMP, quand il y a vote, le résultat est nécessairement soviétique.

Au Parti Socialiste, les congrès sont de vrais congrès, où les débats sont de vrais débats – avec leurs lots de discussions, contradictions, fâcheries, gueulantes et coups donnés sous la ceinture. Au Parti Socialiste, les militants débattent donc, et puis tranchent leurs différences par le vote – avec ce qu’il y faut de tricheries et de contestations, aussi incontournables que marginales. Toujours trop, évidemment, mais répétons-le, au PS au moins, on vote !

La démocratie est un long chemin sur lequel il est toujours risqué de s’engager. A droite, on ne s’y engage pas – et notons-le en passant, pas d’avantage chez les donneurs de leçons de gauche du NPA. Au PS, on est sur le chemin, depuis longtemps, même si la route paraît encore bien longue ici ou là où les pratiques douteuses ont la vie dure. Au moins, partout, on avance et les mauvais élèves de la démocratie socialiste font de plus en plus figure d’exception.

Je sais de quoi je parle, je suis adhérent dans une section qui fut longtemps baronnisée, où tous les pouvoirs étaient détenus par un seul, où par exemple des cohortes de militants fantômes, dont les cotisations étaient payés par la trésorerie de la section, n’avaient d’existence militante que lors des scrutins internes, où ils apparaissaient comme par magie pour voter comme un seul homme afin de permettre la reconduction du chef et entériner sa parole. Le chef choisissait qui pouvait adhérer, le chef choisissait ses sous-chefs, le chef était le candidat aux municipales et aux législatives, bref le chef était la section, laquelle comptait alors moins d’une centaine de miltants presque tous aux ordres – et pour exister, la petite minorité en résistance était contrainte, car ainsi va la politique, d’user des mêmes sales méthodes…

Aujourd’hui, cette section compte plusieurs centaines de militants de toutes les sensibilités, qui travaillent, qui débattent, qui font campagne ensemble, et avant cela qui élisent leurs instances dirigeantes, qui choisissent les candidats aux scrutins municipaux, régionaux et nationaux, qui font vivre la démocratie interne. Tenez, même les partisans de Ségolène Royal s’y sentent bien, c’est vous dire.

Une forte participation : 200 000 militants socialistes étaient appelés à lancer le processus de rénovation en ce prononçant sur un questionnaire détaillé, abordant entre autres questions celle des primaires, celle du cumul des mandats, celle de la parité, celle de la représentation, celle de la sincérité des scrutins internes. Près de 100 000 d’entre eux se sont déplacés.

C’est une participation beaucoup plus forte qu’attendue, largement inespérée compte tenu du peu d’enjeu de ce scrutin, au sens où de toute évidence le OUI l’emporterait sur chacune des onze questions. Compte tenu également des petits calculs très polititiens de certains soutiens de Ségolène Royal qui estimaient qu’il ne fallait pas voter afin de ne pas donner l’avantage à Martine Aubry.

On notera en passant que pour ces derniers la rénovation du Parti Socialiste qu’ils réclamaient avec force piailleries depuis des mois, tout en prétendant être les seuls à réellement la vouloir, n’était en réalité importante que pour peu que cela n’entrave pas le destin présidentiel de leur égérie. Cela permet de grandement relativiser la volonté de rénovation de ces quelques-uns.

La rénovation plébiscitée : Cela faisait quinze ans qu’on en parlait. En 1993 déjà, après une cinglante défaite aux élections législatives, le Parti Socialiste bruissait des mêmes slogans : ouvrir portes et fenêtres, accueillir mieux les sympathisants, en finir avec le cumul, instaurer la parité, renforcer la démocratie interne… Ce sont désormais un peu plus que des slogans : les militants se sont massivement prononcés en faveur de la rénovation et, le point est essentiel, ont mandaté leurs instances dirigeantes pour la mettre en oeuvre.

Il fallait en passer par là. C’est fait. Enfin !

Ici je souligne, à destination de ceux qui répétaient que la volonté de rénovation avait perdu lors du congrès de Reims, que visiblement cette volonté était peut-être un peu plus partagée que cela.

Mais ce n’était qu’un préalable : Rénover n’est pas une fin en soi. Il ne s’agissait que de mettre en place des règles internes modernisées de telle manière que le Parti Socialiste devienne un parti de masse, capable d’entendre la société, d’échanger avec elle, et d’apporter les réponses de gauche qu’elle attend.

La rénovation n’était que le moyen du projet.

Martine Aubry, une méthode : Faire de la politique c’est d’abord consulter, réfléchir et travailler. Ensuite c’est proposer et convaincre. A la fin le peuple tranche. La politique ce n’est pas glamour, ça demande du temps et de la besogne. Il ne suffisait pas de sautiller tel un cabri en réclamant « Rénovation. Rénovation », pas plus qu’il n’est utile de continuer sans fin à piailler « Le projet. Le projet ». Un travail politique sérieux, c’est d’abord un travail politique serein. Cela réclame de s’accorder le temps de la maturation, laquelle maturation ne saurait avoir lieu sous l’éclat pressant des projecteurs.

On avait pu craindre que le Parti Socialiste sombre et se perde dans la superficialité du temps médiatique. Le danger avait guetté les socialistes de céder devant la dictature des paillettes, quand il ne s’agit plus que d’attirer sur soi le tout puissant oeil médiatique, quand le temps politique cherchant à coller au temps médiatique la parole se met irrésistiblement à n’avoir d’autre motif qu’elle-même : aucune pensée ne la précède, aucun acte ne lui succède et la communication tient lieu d’action. Politique au coup par coup, politique de l’intuition et de l’improvisation, rien qui ressemblera jamais à une politique de gauche.

Or on ne saurait prétendre rompre avec le fond politique que Sarkozy fait subir aux français, si l’on commence par lui cèder sur la forme. Aussi faut-il aujourd’hui créditer Martine Aubry de ce qui est une très grande qualité : savoir résister à l’impératif médiatique afin de donner du temps au temps.

La route est encore longue, mais au moins y a-t-il encore une route. Avec une année de recul, c’est cela essentiellement qui s’est joué lors du dernier congrès des socialistes: l’espoir.

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