Nov 232008
 

enterrement d'égos au Parti Socialiste« Manuel Valls, lieutenant de Ségolène Royal, a annoncé dimanche sur Canal + qu’une plainte serait déposée pour « faux en écriture » contre un décompte de voix de militants socialistes à Lille, bastion de Martine Aubry, arrivée en tête du second tour du vote PS vendredi. » – AFP

« Le premier secrétaire de la fédération PS du Nord, Gilles Pargneaux, proche de Martine Aubry, a annoncé qu’il porterait plainte pour diffamation contre Manuel Valls, après son annonce d’une plainte pour faux en écriture à propos d’un décompte de voix d’une section PS à Lille. » – AFP

Voilà où nous en sommes ! Deux extraits d’une même dépêche AFP qui illustrent tout le délire qui s’empare actuellement de quelques dirigeants socialistes – et je fais là bien attention à ne pas dire les dirigeants socialistes, tant il me semble crucial de ne pas sombrer dans un tous pourris qui serait tout aussi délirant…

Il y a d’abord le fait que Martine Aubry serait arrivée en tête, ce qui à ce stade n’est qu’une hypothèse, hypothèse non avérée et qui le restera tant que le Conseil National du Parti Socialiste n’aura pas statué sur les résultats définitifs, lesquels devraient être annoncés par François Hollande dans les 36 prochaines heures.

Tout a commencé là, dans cette bataille d’intoxication de l’opinion où l’on a d’abord vu les partisans de Ségolène Royal annoncer très prématurément, à peine le scrutin était-il clos, la victoire de leur championne, avançant un résultat de 52% contre 48% (et sur 135 000 voix exprimées, cela représenterait plus de 5000 voix d’avance !). Aussitôt, les partisans de Martine Aubry ont contesté ces chiffres, affirmant que les résultats restaient pour eux très serrés, très proche du 50/50.

Force est de constater que ces derniers avaient raison et que, toutes irrégularités prises en compte, l’écart entre les deux candidates, qu’il soit dans un sens ou dans l’autre, est d’avantage de l’ordre de quelques centaines, voire même de quelques dizaines de voix, que des quelques milliers de voix dont les ségolénistes s’étaient targués. Cette réalité d’un 50/50 était alors une raison supplémentaire pour que Martine Aubry ne s’en aille pas à son tour revendiquer une victoire qui ne lui est pour l’heure en rien acquise.

Il se serait agi plutôt, pour les uns comme pour les autres, pour le moins de se taire et d’attendre les résultats, que d’aller se répandre dans les médias, aussi bien en personne que par lieutenants interposés, afin de poursuivre la grande opération d’intox au travers de laquelle il s’agit surtout de faire peser toutes les suspicions sur l’autre camp. Et s’ils ne savaient pas se taire, du moins pouvaient-ils simplement reconnaître que le seul résultat tangible du scrutin est qu’il place les deux candidates à égalité.

Et ce constat pouvait même – mais ce serait là sans doute un peu trop demander – amener les uns et les autres à se remettre en question. Car pour l’une comme pour l’autre, 50% des voix exprimées – un peu plus pour l’une et un peu moins pour l’autre, qu’importe en réalité – avec 40% d’abstention est d’abord le constat d’un rejet majoritaire de l’une et de l’autre. Sans aucun doute le constat que ni l’une ni l’autre n’est à même d’incarner l’unité des socialistes et cette volonté sur laquelle tout le monde s’accorde d’un renouvellement des responsables.

Je reste d’ailleurs pour ma part persuadé que si Ségolène Royal avait daigné s’effacer en faveur de Vincent Peillon à la suite du vote sur les motions, la synthèse aurait été trouvé et aujourd’hui Vincent Peillon serait le premier secrétaire d’un PS largement rassemblé. Ne le faisant pas, il fallait d’évidence comprendre que pour Ségolène Royal il s’agissait de mettre en place ce credo qui est toute sa motivation : Rien Sauf Elle-même.

Martine Aubry eut alors la même opportunité, s’effacer au profit de Benoit Hamon. Là encore une synthèse majoritaire devenait possible et là encore, assez probablement, Benoit Hamon aurait été porté par les militants à la tête du Parti Socialiste. Mais pour Martine Aubry, visiblement, il s’agissait avant toute autre considération de tuer politiquement Ségolène Royal.

Quoi qu’il en soit, au final, la stratégie de l’une et de l’autre aura échoué : les militants socialistes – et ce n’est pas tellement surprenant – ne sont pas davantage guidés par un Ségolène Sinon Rien que par un Tout Sauf Royal.

Mais cela ne pouvait satisfaire aucun des deux camps. Le jeu de massacre ne s’arrête donc pas et plutôt que de convenir à minima d’un constat d’égalité, chacune préfère l’emporter sur l’autre, à n’importe quel prix et en portant tous les coups jusqu’aux plus irresponsables. On compte une dizaine de voix oubliée ici, quelques autres rajoutées par là – comme si cela pouvait changer quelque chose à la réalité – ; on crie à la fraude – comme si les uns étaient parfaitement blancs et les autres d’une noirceur totale – ; on demande de re-voter – comme si prolonger encore ce cirque était une bonne idée, comme si le résultat pouvait n’être pas une nouvelle égalité – ; on en appelle aux militants, on leur demande de manifester devant le siège du Parti Socialiste – comme s’ils ne venaient pas de s’exprimer, comme si les uns valaient mieux que les autres, comme s’il fallait en sus déclencher une bataille de rue entre les uns et les autres – ; … et voilà donc maintenant qu’on menace de porter tout cela en justice – comme si on avait le temps d’attendre une décision de justice, comme si une telle décision allait permettre de rassembler les socialistes, comme si on ignorait que l’immense majorité des militants n’attend que cela, qu’on se rassemble et qu’on se mette au boulot : rénover le parti, élaborer un projet, s’opposer à Sarkozy.

STOP ! … et puis donc faire baisser la température, comme nous y invite Nicolas J.

Martine Aubry, Ségolène Royal, le résultat du vote des militants est que vous êtes à égalité. La conséquence est que ni l’une ni l’autre ne saurait être tout à fait légitime. L’exigence qui en découle est que dans l’intérêt supérieur du Parti Socialiste, c’est-à-dire de ce combat qui nous est commun, est que vous vous mettiez l’une et l’autre au travail. Et si vous faites le constat que cela vous serait impossible de travailler en toute intelligence – ce qui est en effet plus que probable – que l’une et l’autre se désistent en faveur d’un doublon qui saura faire le boulot.

Compte tenu du déroulement de ce congrès, il me semblerait à moi raisonnable que Ségolène Royal consente cette fois à s’effacer derrière Vincent Peillon et que Martine Aubry en face de même au profit de Benoit Hamon. Benoit Hamon, Vincent Peillon : voilà un tandem qui donnerait au Parti Socialiste une autre image de lui-même, et qui lui ressemblerait sans doute davantage. Un bon début pour une rénovation, non ?

Mais en effet, on se moque bien de ce qui me semble. On se moque cependant beaucoup moins que ni l’une ni l’autre n’assume un résultat et ne prenne ses responsabilités…

(je l’ai déjà dit, mais si l’on pouvait au moins commencer par faire taire Manuel Valls et Julien Dray…)

Crédit dessin : © SaT sur La République des Fourmis – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

Où l’on parle de : Ils sont devenus fous


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