Avr 152009
 

charcutage électoralIl y a beaucoup à dire à propos du découpage électoral, mais la première chose qu’on omet trop souvent de dire est que c’est d’abord un problème mathématique avant d’être une question politique. Le problème du découpage électoral est un problème d’optimisation combinatoire sous contraintes.

Je ne vais pas faire long sur ce point – vous refuseriez de me suivre. Simplement dire qu’il s’agit simplement :

– dans un premier temps de répartir les 577 sièges de députés entre les départements français de manière optimale, c’est-à-dire afin que partout, autant que faire se peut, un député représente le même nombre d’habitants ;

– dans un second temps, de découper chaque département français en plusieurs circonscriptions – autant qu’il dispose de députés – de sorte que chaque circonscription couvre une population équivalente aux autres.

Pour cette dernière opération, il s’agit de fixer des contraintes supplémentaires d’homogénéité, c’est-à-dire qu’on cherchera à minimiser la concavité des circonscriptions – dans les schémas ci-dessous, on préférera la situation A à la situation B :

découpage électoral et convexité

Une fois qu’on entre en sus quelques éventuelles contraintes géographiques – ne pas franchir tel fleuve ou telle montagne, ne pas couper tel village en deux… -, le mathématicien fera tourner ses outils, et l’on obtiendra un découpage optimal, garanti sans charcutage.

Mais ce n’est pas le chemin choisi en Sarkofrance et toutes les suspicions en deviennent légitimes. On assiste déjà à un début de polémique entre l’opposition socialiste et le Alain Marleix, le secrétaire d’Etat aux collectivités territoriales, chargé du découpage électoral. Les premiers ayant fait remarqué que sur les 33 circonscriptions supprimées dans le projet gouvernemental, 23 sont actuellement détenues par la gauche et 10 par la droite, le second a rétorqué qu’en réalité les chiffres sont respectivement 18 et 15.

Je vous l’annonce ici, c’est le décompte de Alain Marleix qui est faux. Car voici comme il procède :

découpage électoral

Sur ce département, Mr Morlaix a décidé de supprimer la circonscription C. Tout naturellement, le voici donc qui décompte une circonscription UMP de supprimée. Certes, mais il faut donc bien maintenant répartir les électeurs correspondants dans les trois autres circonscriptions… Il ne suffit alors au charcutier Morlaix que de bien répartir les bureaux de vote pour obtenir la situation suivante :

découpage électoral et convexité

Où donc l’on constate qu’en supprimant une circonscription acquise à l’UMP, on se retrouve avec un département qui avait deux député PS et deux députés UMP et qui risque fort la prochaine fois d’avoir trois députés UMP contre aucun pour les socialistes. Et c’est donc bien en réalité deux circonscriptions socialistes qui ont été supprimées, tandis que l’UMP en gagnerait une.

Inutile d’en dire davantage pour comprendre à quoi nous sommes en train d’assister et qui consiste à rendre toute alternance de plus en plus difficile, le pouvoir étant de fait confisqué par Nicolas Sarkozy et sa horde de députés UMP – et ce dans une République où nous savons déjà que le Sénat ne saurait échappé à la droite tant le mode de scrutin lui est favorable, au mépris là encore de toute règle démocratique.

Pour ceux qui voudraient aller un peu plus loin, les articles sur Wikipedia sont relativement bien fichu – celui-ci et celui-là. Le mieux étant de se procurer le bouquin de Michel Balinski, Le suffrage Universel Inachevé.

Où l’on parle de : Tripatouillage démocratique


Sarkozy sans opposant